Medef Rouen Métropole

Guy Buisson : « Le secteur des loisirs est le grand oublié de la crise »

Guy Buisson est le président du Medef Rouen Métropole. Bilan 2020, perspectives 2021, contournement Est, Brexit ou encore aides aux entreprises, il fait le point sur la situation économique du territoire.

Guy Buisson est président du Medef Rouen Métropole. (Photo Medef)
Guy Buisson est président du Medef Rouen Métropole. (Photo Medef)

Comment les entrepreneurs de la Métropole de Rouen ont vécu l'année 2020 ?

« Ils ont vécu 2020 avec beaucoup de résilience. Ils ont le pied sur l’accélérateur pour amorcer la reprise mais sont freinés d'un autre côté par de nouvelles problématiques comme la hausse du coût des matières premières, les délais de livraison allongés... Les chefs d'entreprises sortent de cette année très fatigués, psychologiquement, tout comme les collaborateurs. L'année n'a pas été vécue de la même façon en fonction des secteurs. Le bâtiment est en recherche de main d’œuvre et subit cette pénurie de matières premières. Le transport, un maillon important, a vu son économie se tendre. Le secteur bancaire surveille le remboursement des Prêts garantis par l’État (PGE), et demande plus de dialogue. La grande distribution, quant à elle, marche à bloc, tout comme le secteur de l'alimentaire. »


Quid du secteur de la culture, des loisirs et des cafés-hôtels-restaurants ?

« Les CHR (cafés-hôtels-restaurants) sont en souffrance. Après cette crise, certains vont renaître, d'autres vont disparaître. La branche restaurant a un genou à terre. Certains s'en sortent bien en cumulant les activités comme la vente à emporter. Pour ceux-là, je me pose la question de la pertinence des aides de l’État. Le secteur des loisirs est le grand oublié de cette crise. Je pense notamment aux parcs d'attraction. S'ils ne rouvrent pas à partir du mois de mai, ça va être catastrophique. Il y a aussi une vraie problématique concernant le secteur de la culture. Il faut que les entreprises restent ouvertes à l'art et soient solidaires. Personnellement, je serai le premier, lorsque la crise sera finie, à organiser une exposition dans mon entreprise ou une sortie au théâtre. Il y a aussi quelque chose à faire pour les intermittents du spectacle qui sont écartés des négociations concernant l'assurance-chômage, il faut que l'effort soit national et une société équilibrée. »


2020 a été marquée par l'émergence du télétravail massif, qu'en pensez-vous ?

« La crise a eu effet d'accélérateur technologique. Nous avons fait en un an ce qu'on n'aurait pas pu faire en 10 ans. Cela a notamment engendré une baisse des surfaces immobilières pour les entreprises. Dans les grands groupes, le télétravail est cadré mais dans les PME, cela est plus difficile. Après le Covid, il en restera quelque chose, c'est certain. »

« Dans les entreprises, nous sommes prêts à vacciner, mais nous n'avons pas de doses. »

Le Medef Rouen Métropole a-t-il pris part à l'élaboration des aides aux entreprises et comment ?

« Le Medef a été quotidiennement associé concernant les aides de l’État avec des points hebdomadaires à ce sujet. Nous sommes l'intermédiaire entre les entreprises et l’État. Ce que je retiens est que les réponses pour les Prêts garantis par l'Etat ont été très rapides avec un délai moyen de 5 jours. Il y a eu beaucoup de dialogue. En tant que président du Medef Métropole Rouen, j'ai porté l'accord sur la santé au travail, signé en décembre 2020, avec pour principe de développer la prévention dans le monde du travail, et j'en suis fier. »


Quel est l'état d'esprit des chefs d'entreprises pour ce début d'année 2021 ?

« Je pense que tous les chefs d'entreprises sont impatients et ont beaucoup d'espoirs avec la vaccination. Dans les entreprises, nous sommes prêts à vacciner, mais nous n'avons pas de doses.»


Avez-vous vu des conséquences du Brexit sur l'économie de la Métropole Rouen Normandie ?

« Le Brexit a eu des premières conséquences, notamment avec le rachat par la Macif de Aviva France (la filiale française de l'assureur britannique fin février). Rouen est une belle ville, proche de Dieppe et connue par les Anglais. Il faut aller plus loin en allant chercher des entreprises de Londres, notamment dans le secteur financier, bancaire ou dans le développement médical. »


En ce début d'année, il y a eu beaucoup de rebondissements autour du contournement Est. Quel regard portez-vous sur ce sujet ?

« Nous avons besoin du contournement Est. Regardez les grandes villes du littoral atlantique comme Brest, Nantes ou encore La Rochelle, toutes ont solutionné la circulation par un contournement routier. Il n'y a qu'à Rouen où les habitants subissent les bouchons, les odeurs et la pollution que cela engendre. L'objectif n'est pas de faire l'autoroute de papa des années 70 en CX, mais de proposer une solution globale avec une infrastructure moderne qui répond aux problématiques environnementales grâce à des alternatives. Au-delà de la circulation, le contournement Est permettra aux entreprises d'avoir plus d'espace pour s'installer. Rouen est un territoire riche, le contournement Est pourrait être un atout majeur. »


Vous saluez l'annonce des présidents de Département et de Région d'augmenter leurs contributions financières à la suite du renoncement de la Métropole ?

« Je ne suis pas politique, mais comme c'est une question sur la politique, voici ma réponse de politique : j'aime les gens qui assument leur mandat. »


Si vous deviez imaginer le territoire métropolitain du futur, quelles seraient vos propositions ?

« Nous manquons d'imagination pour construire le territoire du futur. Pourquoi ne pas imaginer un train à hydrogène, avec des voies qui passeraient au milieu de l'A13. Cela permettrait de développer le ferroviaire. Je proposais d'aller chercher des entreprises à Londres, mais pour un Britannique qui veut rentrer chez lui, ce n'est pas très fluide de prendre le train jusqu'à Paris, puis changer de gare, pour reprendre un train pour Londres. Nous pouvons imaginer une solution en hélicoptère qui amènerait les passagers directement à Beauvais pour prendre leur avion, comme on peut prendre l'hélicoptère pour aller à l'île d'Yeu. Je trouve qu'on manque d'ambition internationale. Le cadre britannique qui veut s'installer à Rouen avec ses enfants n'a aucune école où les scolariser. Il faut créer des cursus pour des futurs cadres à dimension internationale, c'est fondamental. Le contournement Est serait aussi une structure du futur, qui répondrait aux contraintes économiques et écologiques. Développer le fluvial est un souhait légitime, mais c'est faire au XXIe siècle ce qui existait au XVIIIe. »