Alexis Péan, artisan d’art : l’amour du travail du bois et de la musique

Du 6 au 11 avril, se déroulent les journées européennes des métiers d’art. Les mesures sanitaires renforcées en Seine-Maritime ont eu raison des manifestations locales prévues pour l’occasion. Pour autant, les artisans d’art poursuivent leur travail. Portrait d’Alexis Péan, luthier à Rouen, spécialisé dans le quatuor à cordes frottées.

Alexis Péan a ouvert son atelier en 2006 à Rouen.  (@Aletheia Press  / Benoit Delabre)
Alexis Péan a ouvert son atelier en 2006 à Rouen. (@Aletheia Press / Benoit Delabre)

C’est une passion de longue date pour la musique et le bois qui a conduit Alexis Péan à ouvrir sa lutherie spécialisée dans le quatuor à cordes frottées en 2006, à Rouen. L’histoire débute en 1995, à l’heure de réfléchir à son orientation. « J’étais en 3e, et je voulais me diriger vers un métier associant musique et travail du bois. Mon père travaillait dans le milieu du piano, mais j’ai choisi d’être luthier. » L’adolescent, qui vit en Normandie, est attiré par les multiples facettes de ce travail à mi-chemin entre artiste et artisan.

Le prestigieux atelier Vatelot-Rampal

« Avec des outils rudimentaires et simples, on réalise un instrument, qui plus est, indépendant de tout mécanisme ayant un côté industriel », souligne le luthier qui, à la sortie du collège, fait partie des 8 jeunes admis à entrer à l’unique Ecole Nationale de Lutherie de Mirecourt, dans les Vosges. À l’issue de trois ans de formation, il obtient un CAP. Suivent un Brevet Technique puis un diplôme des Métiers d'Art qui aborde plus particulièrement la restauration.

En 2000, ces diplômes en poche, Alexis Péan entre dans les prestigieux Ateliers parisiens Vatelot – Rampal. Des instruments d’exception passent entre ses mains. « Mais le rythme parisien me donnait l’impression d’avoir une vie d’ouvrier, et j’ai décidé de revenir à Rouen ».

La restauration représente environ 70 % de l’activité. (@Aletheia Press / Benoit Delabre)

Il faut dire que la ville possède de véritables atouts avec son opéra et son conservatoire, et l’artisan peut mettre à profit ses réseaux. C’est ainsi qu’à 26 ans, il ouvre son atelier où défilent violons, altos, violoncelles et contrebasses, provenant de toute la région. « 70 % de mon activité consiste à restaurer des instruments, explique Alexis Péan. Le reste du temps est consacré à la fabrication, deux à trois instruments, selon leur taille, chaque année. Mais avec la crise sanitaire j’ai eu plus de temps. L’année dernière, j’ai réalisé deux violoncelles, ce qui est assez exceptionnel…». L’artisan ne travaille pas sur commande. « J’aime à rester libre », explique-t-il.

Jusqu’à Shangaï

Quatre années consécutives, avant que le Covid n’apparaisse, Alexis Péan a séjourné quinze jours à Shanghai, pour participer à un salon professionnel international pour les instruments de musique et leurs accessoires. Une occasion en or pour présenter son savoir-faire, vendre ses créations ou des instruments restaurés par ses soins.

Dernière activité de l’atelier, la location d’instruments de musique qui bat son plein autour de septembre, lors de la rentrée au conservatoire de musique. « Pour le quatuor, en moyenne, un enfant change d’instrument quatre à cinq fois avant d’atteindre la taille adulte, explique le luthier. C’est un plaisir de voir débuter les gamins, de les suivre. »

Quand on demande à Alexis Péan s’il est musicien, il répond : « J’ai appris plusieurs instruments : le piano, le violoncelle, la guitare et je suis passionné de musique. » Mais il ne se décrit pas comme un virtuose. « Je suis comme un mécanicien de formule 1. Il travaille sur le moteur mais ne la conduit pas. Le soir, il repart chez lui en Clio ! » Ainsi, quand un instrument, doit être testé, « j’appelle un ami musicien pour le faire. »

Pour Aletheia Press, Lætitia Brémont