Economie

Atterrissage confortable pour le e-commerce

Après le pic atteint lors de la pandémie et la décrue qui a suivi, le e-commerce a repris sa dynamique traditionnelle, d’après la Fevad. En 2022, le chiffre d’affaires du secteur atteint près de 147 milliards d’euros. Et l’avenir semble prometteur : la génération Z est accro aux achats en ligne.

Atterrissage confortable pour le e-commerce

Retour à la normalité. Le 7 février, la Fevad, Fédération du e-commerce et de la vente à distance, présentait le bilan du e-commerce en 2022, à Paris. L’an dernier, le marché a atteint 146,9 milliards d’euros de chiffre d’affaires, en croissance de 13,8 % par rapport à 2021. C’est le fruit de 2,28 milliards de transactions (+ 6,5 %). Les 80 % de Français qui réalisent des achats en ligne le font 54 fois par an, en moyenne, pour un montant de 3 515 euros. Le panier moyen, en baisse structurelle depuis 10 ans, après un pic vers 2007 (91 euros) s’est regonflé de 6,9 % en 2022, pour atteindre 65 euros. « Le e-commerce représente un marché d’un poids économique conséquent, l’équivalent du secteur du BTP », souligne Marc Lolivier, délégué général de la Fevad, qui estime que la barre des 200 milliards d’euros devrait être atteinte en 2025.

L’année qui vient de s’écouler a été très contrastée : le premier semestre a été marqué par une véritable chute de l’activité, suivie au second d’une stabilisation. Dans une perspective plus longue, les 18 mois de pandémie ont été l’occasion d’une croissance très forte à laquelle a succédé 12 mois de décrue. A présent, « nous avons retrouvé une stabilité à un niveau de 20 % supérieur à celui de 2019. Il n’y a pas de retournement de tendance du marché. Le e-commerce a repris la linéarité de sa dynamique de long terme », constate Marc Lolivier. En outre, « le rééquilibrage auquel nous assistons concerne également la structuration du marché, où traditionnellement, les services sont majoritaires. Durant la période exceptionnelle du Covid, nous avons connu une très forte accélération des ventes de produits, alors que celles des services baissaient fortement. Les courbes se sont ensuite inversées puis croisées », décrit-il. Cas particulier, les produits de grande consommation – qui partaient de très bas- constituent le secteur qui a le plus progressé durant la crise. Le chiffre d’affaires a augmenté de 56 % par rapport à 2019. Et il a continué de croître de 1 % en 2022, alors même que les Français restreignent leurs achats dans ce domaine. Pour l’alimentation, « durant la pandémie, de nouveaux clients ont été conquis et une partie importante d’entre eux sont restés, après la réouverture des magasins », note Marc Lolivier.

Du côté de l’offre (207 000 sites marchands), la Fevad observe un élargissement : le solde net atteint 10 000 sites en 2022. Avec 5 % de croissance, « , il y a un ralentissement par rapport aux deux années précédentes, mais la dynamique de la digitalisation se poursuit », pointe Marc Lolivier. Les dynamiques des pure playeurs et des enseignes traditionnelles ont été comparables en 2022. Autre constat, la tendance à la « plateformisation » de l’offre se confirme : « Avec une baisse de 1,6 % en 2022, les places de marché ont particulièrement bien résisté, car elles ont embarqué de nombreuses PME ». Entre 2019 et 2022, leur volume d’affaire a augmenté de 30 %, contre 17 % pour les ventes en propre. Autre tendance en développement, celle des ventes via mobile : + 8 % en 2022, un bond nourri par la croissance des services. La dynamique est particulièrement marquée au sein de la génération Z (12 à 25 ans) : 75 % d’entre eux utilisent un téléphone mobile pour acheter, contre 61 % des cyberacheteurs.



Esquisse du e-commerce de demain

Cruciale pour essayer de décrypter l’avenir du e-commerce, cette génération a fait l’objet d’une étude de l’institut Odoxa pour la Fevad. Ces jeunes sont « nés avec le e-commerce », souligne Céline Bracq, cofondatrice et directrice générale d’Odoxa. Résultat de cette familiarité, la génération Z réalise en moyenne 40,5 % de ses achats sur Internet, contre 29,5 % pour l’ensemble des cyberacheteurs. Cela n’empêche pas ces deux catégories d’acheteurs de partager certaines motivations à leurs cyberachats : les prix et la praticité de la démarche. Toutefois, les 12 à 25 ans ont aussi des finalités qui leur sont propres. Près du tiers d’entre eux cherchent sur Internet un produit « original », et 14 % un produit « mode » ou « tendance », quête qui mobilise moins l’ensemble des consommateurs (20 % et 5%). Par ailleurs, si globalement, la génération Z achète prioritairement les mêmes catégories de produits que les cyberacheteurs dans leur ensemble, c’est en plus grandes proportions. Ainsi, 75 % d’entre eux achètent des articles de mode, contre 56 % des cyberacheteurs. Le différentiel est également important pour la chaussure (51 % contre 41%) et les bijoux (26 % contre 16%). Dans le domaine des service aussi, «on constate des différences de types d’achats », ajoute Céline Bracq. En particulier, la génération Z achète en ligne beaucoup plus de transports, musique, livres, vidéo jeux, livraison de nourriture à domicile et covoiturage. Les 12-25 ans se distinguent aussi par certains usages spécifiques : 63 % d’entre eux ont déjà acheté des produits reconditionnés ou de seconde main, contre 48 % des cyberacheteurs. Et 56 % ont revendu des produits en ligne (contre 44 %).

Motivations écologiques ou économiques ? Quoi qui en soit, cette génération réagit comme l’ensemble des cyberacheteurs face aux contraintes actuelles de la crise écologique et de l’inquiétude liée à la baisse du pouvoir d’achat. Dotés de budgets restreints, les 12-25 ans déclarent encore plus que les autres se focaliser sur les produits dont ils ont « réellement besoin » ou qui sont « en promotion ». Par ailleurs, pour limiter leur impact sur l’environnement, ils sont, comme les autres, partants pour privilégier la qualité à la quantité et essayer au maximum d’éviter de renvoyer des commandes. Spécificité de cette population pour partie juridiquement mineure, les 12/25ans sont 72 % à réaliser leurs achats avec un adulte, quand ce n’est pas ce dernier qui se charge directement de la transaction. « C’est le règne de la carte bancaire », résume Céline Bracq, avec un taux de recours qui s’élève à 84 %, comme pour tous les cyberacheteurs. Toutefois, les jeunes préfèrent les solutions de paiement électronique : 43 % d’entre eux les utilisent (type PayPal), contre 39 % de la population et 10 % des cagnottes en ligne (deux fois plus que la moyenne). Autre tendance spécifique à cette génération, une interpénétration particulièrement forte entre la dimension numérique et la visite en magasin : 60 % consultent leur smartphone dans le magasin pendant qu’ils réalisent un achat, contre 46 % des cyberacheteurs.