Ces start-up qui inventent l'entreprise responsable de demain

Crédit Photo : A.DAUBREE Au salon Produrable, le stand de BienElevées au premier plan
Crédit Photo : A.DAUBREE Au salon Produrable, le stand de BienElevées au premier plan

Arrêter de produire des déchets, cultiver du safran sur son toit… La pandémie a mis en exergue l’urgence, pour les entreprises, d’adopter une démarche responsable vis à vis de la société et de la planète. Au salon Produrable, à Paris, des start-up proposent des solutions.

«Il fallait venir plus tôt pour avoir une place...». Les queues s’allongent, tout le monde ne parviendra pas à assister à l’atelier «Comment intégrer le transport au cœur de vos stratégies RSE» ou «Comment mon entreprise peut agir concrètement pour la forêt française et l’environnement avec l’ONF [Office national des forêts] »…Le 8 septembre, à Paris, la pandémie n’a pas découragé les visiteurs  de la 13ème édition du salon Produrable, consacré aux solutions de l’économie durable, thématique que la crise actuelle rend particulièrement prégnante. 

Les exposants sont aussi au rendez-vous. «Nous sommes venus rencontrer des chargés de RSE des entreprises et les intermédiaires qui proposent des catalogues de solutions d’agriculture urbaine», témoigne Bérengère du Bessey, co-fondatrice, avec ses trois sœurs, de BienElevees. Depuis 2017, elles cultivent du safran sur des toits d’entreprises parisiennes. L’entreprise fait partie de la vingtaine de jeunes pousses invitées sur le salon Produrable par Bpifrance, la banque publique d’investissement, qui proposent des outils destinés à aider les entreprises à adopter ou approfondir une démarche responsable.«Notre objectif consiste à reverdir la ville, tout en produisant du safran, une épice que l’on fait  habituellement voyager au moins 5 000 kilomètres, et en organisant des ateliers de reconnexion avec la nature. Nous avons éprouvé notre modèle. Pour les entreprises, il s’agit d’une opération gagnant-gagnant», poursuit Bérengère du Bessey. Le modèle économique est sophistiqué : l’entreprise commercialise un service de végétalisation de toits et d’animation d’ateliers auprès de sociétés. De plus, elle vend le safran à des professionnels de la restauration, ainsi que des produits dérivés, comme des biscuits.

L’agriculture urbaine figure parmi les thématiques dont se sont emparées les start-up. Une autre, UrbanLeaf, propose des systèmes de culture basés sur l’aquaponie (sans utilisation de  terre). Mais la palette des prestations imaginées par les jeunes pousses  est très large. Par exemple, elles proposent des logiciels qui permettent de simuler l’empreinte écologique de la production d’un produit ( Altermaker), l’accompagnement pour arriver au «zéro déchet» (Take a waste), et des prestations d’équipement de bureaux de seconde main (Bluedigo). 

RSE pour les PME et cinéma vertueux 

Positive Workplace, ( cinq salariés) ambitionne de devenir le «label RSE des start-up, PME et ETI».«L’objectif consiste à vulgariser la RSE auprès des PME», explique Lucie Lemonnier, associée. L’idée ?  Proposer une démarche simple aux entreprises, qui passe par la réalisation d’un audit en ligne. Celui-ci est complété par des «enquêtes anonymes», renseignées par les parties prenantes de la société (salariés, clients, fournisseurs). La démarche s’appuie sur le référentiel de la norme ISO 26000 et les ODD, Objectifs de développement durable des Nations Unies. Quelques entreprises ont déjà souscrit, dont Planète Oui, fournisseur d’énergie verte, en cours de labellisation. 

Une autre start-up présente à Produrable, Pixetik, a choisi le champ de  l’audiovisuel. Il s’agit d’«utiliser le pouvoir d’influence de la fiction pour proposer des marques durables, écologiques, ou des écogestes qu’elles voudraient faire passer», explique Morgane Baudin, co-fondatrice de l’entreprise, en 2019. «Savez-vous qu’à la suite du film Top Gun, avec Tom Cruise, les ventes de lunettes Ray Ban ont augmenté de 40%?», interroge-t-elle. Dans cette même démarche de placement de produits, qui consiste à faire apparaître une marque dans un film, Pixetik a fait figurer les accessoires pour cheveux de la marque Justine B, (mode bio et éthique) dans la série Derby Girl ( France Télévisions). Les partenariats mis sur pied par Pixetik peuvent aussi être plus complexes, à l’image de celui noué entre les producteurs de la série «L’effondrement» ( Canal +) et la chaîne de magasins  de produits en vrac Day by Day. Celle-ci a nourri les équipes durant le tournage, et bénéficié d’une visibilité au montage et dans les making-of. Demain, peut-être, l’un des personnages du très populaire feuilleton  «Plus belle la vie» (France Télévisions), conseillera à un proche de se rendre dans un atelier de réparation de vélos plutôt que de jeter le sien, à l’initiative d’une marque de cycle… 

Si les problèmes de trésorerie ne sont jamais à exclure, l’activité de ces start-up ne devrait pas être entravée par la pandémie, mais plutôt stimulée. «La  demande de reconnexion avec la nature va augmenter, tout comme la volonté de savoir d’où viennent les produits que l’on consomme», estime, par exemple, Bérengère du Bessey. 

 Anne DAUBREE