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La hausse des prix de l’énergie exacerbe la précarité

Environ 9 millions de Français se sont trouvés en situation de privation matérielle et sociale en début 2022, selon l’Insee. L’inflation et la reprise des habitudes de vie pré-pandémique contribuent à l’érosion du pouvoir d’achat des ménages, accentuant ainsi la précarité.

(© Adobe Stock)
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La précarité gagne du terrain. Avant que les associations de lutte contre la pauvreté alertent sur leur manque de moyens pour faire face à un nombre accru de bénéficiaires, l’Insee pointait déjà cette tendance dans une étude publiée cet été. Début 2022, neuf millions de Français étaient en situation de privation matérielle et sociale, soit 14% de la population de la France métropolitaine, marquant ainsi son plus haut niveau depuis 2013. L’indicateur s’établissait à 13,4% avant la crise sanitaire ; à 11,3%, en 2021, mais cette baisse était attribuable aux restrictions liées à la pandémie de Covid-19 ayant temporairement réduit les dépenses des ménages.

La situation de privation matérielle et sociale se caractérise par un cumul de cinq renoncements au minimum parmi une liste de 13 éléments de la vie quotidienne, comme acheter des vêtements neufs, partager des moments de convivialité, avoir des loisirs, chauffer son logement ou accéder à Internet à domicile.

Les prix de l’énergie, principal facteur

Le taux de précarité est principalement impulsé par les difficultés financières liées au chauffage du logement, en nette augmentation. En effet, environ 10% des personnes sondées ne pouvent pas se permettre de chauffer suffisamment leur habitation, contre une moyenne de 5 à 7% entre 2014 et 2021. Cette hausse est essentiellement attribuable à l’augmentation des prix de l’énergie, principalement du fioul domestique, utilisé plus fréquemment par les ménages vulnérables, précise l’Insee.

Parmi les personnes ayant déclaré subir une privation en début 2022, 30,4% ne pouvaient pas faire face à une dépense imprévue de 1 000 euros, 26,4% étaient incapables de remplacer des meubles usagés (+4 points vs 2021) et 24,4% ne pouvaient pas se payer une semaine de vacances dans l’année (+ 3,2 points).

Autre conséquence, le fait de se retrouver dans une situation de privation favorise le sentiment d’isolement. « 25% des adultes en situation de privation matérielle et sociale déclarent ne pas avoir de famille, d’amis ou de voisins à qui ils peuvent demander de l’aide morale, matérielle ou financière », indique l’étude. Seulement 7% de ces adultes ne sont pas confrontés à cette situation. D’autre part, les plus de 16 ans touchés par la privation ressentent un mal-être plus prononcé que les autres. De même, le sentiment d’exclusion est présent chez 27% des personnes concernées par des conditions de vie difficiles.

Les familles monoparentales particulièrement exposées

Le risque de pauvreté matérielle et sociale varie en fonction de la profession, l’âge, la composition du foyer et le niveau de vie ou d’éducation. Le taux de privation se situe à 6,8% chez les couples sans enfants, contre 15,8% chez les personnes seules et 21,5 % dans les familles nombreuses (à partir de trois enfants). Il atteint 31,1% au sein des familles monoparentales, en hausse de 1,3 point entre 2020 et 2022.

Par ailleurs, la plus forte augmentation du taux de privation par rapport à 2020 concerne les habitants des communes rurales (+ 2 points, bien qu’elles concentrent moins de personnes en situation précaire) et urbaines de densité intermédiaires. La hausse des prix de l’énergie y est plus nettement ressentie, la voiture étant davantage utilisée pour les déplacements, notamment.

A.B et B.L

La France proche de la moyenne européenne

La France se situe légèrement au-dessus de la moyenne européenne dont le taux de pauvreté matérielle et sociale s’élève à 12,7%, début 2022, soit son niveau d’avant- pandémie. Celui-ci varie nettement d’un pays à l’autre, atteignant 11,5% en Allemagne, 9% en Italie et moins de 5% au Luxembourg et dans les pays scandinaves. La pauvreté progresse en France et en Allemagne.