L’entreprise et les salariés

L’entreprise et les salariés

Revue de récentes décisions en matière de droit du travail.

Représentant du personnel

Seul le salarié investi d’un mandat représentatif peut se prévaloir d’une absence d’autorisation de transfert de son contrat de travail. (Cass soc., 26 février 2020, pourvoi n° 18-15447)

Harcèlement sexuel

Les propos à caractère sexuel et les attitudes déplacées du salarié à l’égard de personnes avec lesquelles il est en contact, en raison de son travail, ne relèvent pas de sa vie personnelle, nonobstant l’envoi des messages litigieux en dehors du temps et du lieu de travail, en utilisant un téléphone ou une messagerie électronique personnels. (Paris, 12 février 2020, RG n° 19/02355)

Est justifié le licenciement pour cause réelle et sérieuse d’un formateur ayant adopté un comportement déplacé à l’égard de stagiaires, caractérisé par différents faits :  des questions déplacées sur leur vie intime, propos humiliants et offensants à connotation sexuelle, gestes et attitudes déplacés (comme prendre une stagiaire par le bras dans la rue en chantant des chansons grivoises), appels téléphoniques à une stagiaire sur son téléphone privé sans motifs professionnels et photographies des stagiaires à leur insu. La faute grave n’a pas été retenue en raison de circonstances atténuantes, telles que, notamment, l’absence de remarques de sa hiérarchie et de plaintes de ses stagiaires ou collaborateurs des deux sexes pendant 14 ans et son professionnalisme. (Versailles, 19 décembre 2019, RG n° 18/05078)

Harcèlement moral

Lorsqu’un salarié demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail en raison de faits qu’il reproche à son employeur, tout en continuant à travailler à son service, et que ce dernier le licencie ultérieurement pour d’autres faits survenus au cours de la poursuite du contrat, il y a lieu de rechercher d’abord si la demande de résiliation du contrat était justifiée et d’apprécier les manquements éventuels de l’employeur, en tenant compte de leur persistance jusqu’au jour du licenciement. La gravité des faits reprochés (en l’espèce, des faits de harcèlement moral) s’apprécie non à la date d’introduction de la demande de résiliation judiciaire, mais en fonction de leur persistance jusqu’au jour du licenciement. (Aix-en-Provence, 14 février 2020, dossier n° 2020/65).

Rémunération : prime

La suppression d’une prime d’ouverture de centres en contrepartie d’une augmentation de la prime d’objectifs justifie la prise d’acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l’employeur, laquelle produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse. (Nancy, 30 janvier 2020, RG n° 18/01361)

Licenciement : faute grave

Le défaut de présentation par un ambulancier d’un permis de conduire en cours de validité, après plusieurs réclamations de l’employeur, alors que l’exercice de la profession et l’obligation de sécurité en sont dépendants, présente un caractère suffisamment grave pour ne pas maintenir le salarié dans l’entreprise et justifie son licenciement pour faute grave. (Montpellier, 11 décembre 2019, RG n°16/01532)

Rupture conventionnelle : validité

Sauf en cas de fraude ou de vice du consentement, une rupture conventionnelle peut être valablement conclue au cours de la période de suspension du contrat de travail consécutive à un arrêt de travail pour maladie. (Rennes, 24 janvier 2020, RG n° 17/02370)

Actualité Covid-19 : congés payés, durée du travail et jours de repos, ce que prévoit l’ordonnance

L’ordonnance n° 2020-323 du 25 mars 2020, en applicationla loi du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19,prévoit «lorsque l’intérêt de l’entreprise le justifie, eu égard aux difficultés économiques liées à la propagation du covid-19 » :

– de permettre à un accord collectif de branche ou d’entreprise d’autoriser l’employeur d’imposer la prise de congés payés ou de modifier les dates d’un congé déjà posé, dans la limite de six jours ouvrables (soit une semaine de congés payés), en respectant un délai de prévenance d’au moins un jour franc ;

– de modifier, sous préavis d’un jour franc, les journées de repos acquises par le salarié au titre des jours de réduction du temps de travail attribués au titre d’un dispositif de réduction du temps de travail ;

– d’imposer ou de modifier, sous préavis d’un jour franc, les journées ou les demi-journées de repos acquises par le salarié titulaire d’une convention de forfait en jours sur l’année ;

– d’imposer la prise de jours déposés sur le compte épargne-temps, sous certaines conditions.

Le nombre total de jours de repos dont l’employeur peut imposer au salarié la prise, ou dont il peut modifier la date, ne peut être supérieur à dix.

Durée du travail

De manière temporaire et exceptionnelle, les entreprises des secteurs jugés essentiels à la continuité de la vie économique et à la sûreté de la Nation, pourront déroger aux règles d’ordre public en matière de durée quotidienne maximale de travail, de durée quotidienne maximale accomplie par un travailleur de nuit, de durée du repos quotidien, de durée hebdomadaire maximale absolue et moyenne, de durée hebdomadaire de travail du travailleur de nuit. Les secteurs concernés, ainsi que les dérogations admises dans le respect des limites posées par cet article, seront précisés par décret. Tout employeur faisant usage d’au moins une des dérogations admises devra en informer sans délai le comité social et économique (CSE), ainsi que la Dirrecte.

François TAQUET, avocat,

spécialiste en droit du travail et protection sociale