Les défaillances d’entreprises repartent à la hausse mais restent en-deçà de leur niveau habituel

Alors que le nombre de défaillances d’entreprises a été très faible en 2020 et 2021, en raison des mesures de soutien mises en place par le gouvernement en France, il enregistre une hausse depuis début 2022, tout en restant inférieur à son niveau d’avant crise.

Les défaillances d’entreprises repartent à la hausse mais restent en-deçà de leur niveau habituel

Selon les statistiques publiées mi-avril par le cabinet Altares, spécialiste de l’information sur les entreprises, qui comptabilisent toutes les entités (sociétés, entreprises individuelles, professions libérales, associations) ayant fait l’objet d’une procédure collective (sauvegarde, redressement et liquidation judiciaires) en France, le nombre de défaillances d’entreprises a augmenté de près de 35% au premier trimestre 2022, par rapport aux trois premiers mois de 2021 (où il était très bas), mais reste inférieur au niveau du premier trimestre 2020 (où il était à son niveau habituel d’avant crise). Cette hausse, qui a démarré en novembre 2021, traduit l’amorce d’un retour progressif à la normale à mesure que les dispositifs de soutien aux entreprises s’arrêtent.

Près de 10 000 défaillances d’entreprises

Près de 10 000 procédures collectives ont été ouvertes ce premier trimestre. Un nombre qui se rapproche de celui enregistré à la même période de 2020 (10 900), mais nettement inférieur à ceux observés en 2018 ou 2019 (de l’ordre de 14 000). Si tous les territoires sont touchés, l’Ile-de-France et la Corse sont les régions qui résistent le mieux.

Avec 2 188 jugements prononcés, les procédures de redressement judiciaire ont augmenté de 46,6% au premier trimestre 2022 par rapport aux trois premiers mois de 2021. Avec 7 564 jugements prononcés, les liquidations ont enregistré une hausse de 31,7%. Et les 220 procédures de sauvegarde enregistrées représentent une augmentation de 29,4% (mais à peine plus de 2% de l’ensemble des procédures collectives).

Ce sont les entreprises créées depuis moins de cinq ans et, notamment, celles lancées pendant ou juste avant la crise, qui sont les plus touchées par cette vague de défaillances, en particulier dans la restauration et les commerces d’alimentation générale. Si les PME d’au moins 50 salariés résistent bien, avec des taux de défaillance assez stables, le nombre de procédures visant les petites PME (10 à 49 salariés) a dépassé son niveau d’avant crise – des structures très présentes dans les secteurs de la construction, du commerce et de l’industrie.

Aucun secteur n’est épargné

Tous les secteurs sont concernés par cette hausse des défaillances d’entreprises, mais ce sont surtout les activités à destination des consommateurs (restauration, commerce, services à la personne, etc.) qui sont les plus affectés, dépassant parfois les niveaux de 2020. Les activités B2B résistent mieux.

Dans la vente de détail, la situation se dégrade nettement dans le commerce en magasins (surtout en alimentation générale), ainsi que dans le e-commerce. Les défaillances repartent aussi à la hausse dans le commerce d'habillement, la vente et la réparation de véhicules. Dans la restauration traditionnelle, le nombre de défaillances se rapproche des niveaux du premier trimestre 2020, avec une forte hausse pour les débits de boisson.

Du côté des services aux particuliers, la situation se détériore fortement dans les salons de coiffure et les instituts de beauté, où les défaillances dépassent les niveaux d’avant crise. Les activités liées au sport ou à l’enseignement, dont les auto-écoles et la formation pour adultes, renouent avec des niveaux proches de ceux d’avant crise. Le secteur des services aux entreprises résiste mieux. Ce sont les services informatiques et l’édition de logiciels qui subissent la plus forte dégradation, alors que les activités de sécurité et de nettoyage enregistrent une légère baisse des procédures.

Dans la construction, le gros œuvre résiste mieux (grâce à la maçonnerie générale) que le second œuvre. Dans l’industrie manufacturière, c’est la métallurgie-mécanique qui se défend le mieux. Dans le secteur des transports, la dégradation la plus nette concerne le transport routier de marchandises. Enfin, le secteur de l’agriculture a retrouvé son niveau de défaillances d’avant crise.

Après la crise sanitaire, la guerre en Ukraine

Alors que la reprise de l’activité économique fin 2021 laissait présager une réelle embellie en 2022, en dépit de la cinquième vague de Covid-19, la guerre en Ukraine est depuis venue assombrir les prévisions, en raison de son impact sur le moral des ménages et le climat des affaires. Retour de l’inflation, difficultés d’approvisionnement, hausse des prix de l’énergie, risques de pénurie de certains matériaux…

Le Plan Résilience récemment mis en place par le gouvernement doit venir amortir les difficultés rencontrées par les entreprises directement impactées par la guerre et par celles qui sont particulièrement pénalisées par la hausse des prix de l’énergie. Dans ce contexte, « la trajectoire à la hausse des défaillances d’entreprises devrait se poursuivre, mais sans laisser présager à ce stade une déferlante de faillites, les entreprises disposant encore de liquidités », estime le directeur des études Altares, Thierry Million.

Le trio des régions les plus touchées

En ce début 2022, si l’Ile-de-France (+16% par rapport au premier trimestre 2021) et la Corse (-2,4%) sont les régions qui résistent le mieux à la vague montante des défaillances d’entreprises, la dégradation la plus rapide est observée dans les Hauts-de-France (+72 % vs premier trimestre 2021), en particulier dans le département du Nord (+92 %), selon le cabinet cabinet Altares. Viennent ensuite la Bourgogne-Franche-Comté, à plus de 66 % ( après un recul de près de 52 % début 2021), où le nombre de défauts a plus que doublé en Saône-et-Loire et Côte-d’Or, et la Normandie avec une hausse de 52 % des ouvertures de procédures collectives .

B.L