En 2023, un rattrapage post-Covid des défaillances au tribunal de commerce du Havre

L'audience solennelle de rentrée du tribunal de commerce du Havre a eu lieu jeudi 1er février. L'occasion pour la présidente Cristel Bétremieux de faire le point sur le bilan 2023.

Photo Gazette Normandie
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Le tribunal de commerce est l'indicateur de la santé économique du territoire. En 2023, « nous ne sommes pas dans la vague des défaillances annoncées », annonce Cristel Bétremieux, présidente du tribunal de commerce du Havre. 

Le tribunal de commerce havrais enregistre une hausse de 39% du nombre d'ouvertures des procédures collectives (252 en 2023 contre 181 en 2022), légèrement au-dessus de la moyenne nationale (+35% d'ouvertures de procédures collectives à l'échelle nationale). « Ces procédures sont donc un rattrapage post-Covid des défaillances des entreprises qui concernent des petites structures sans salarié », précise-t-elle. 

La présidente alerte sur un nombre important d'ouvertures de procédures collectives au dernier trimestre 2023. « Il sera nécessaire de rester vigilants […] Nous nous attendons à des défaillances plus importantes en 2024 ». Sur le territoire havrais, cette hausse de faillites d'entreprises a été la plus importante dans les secteurs du commerce-hôtellerie-restauration, le transport et la construction.

"Les entreprises viennent au tribunal
trop tardivement" 

« Nous constatons que ces procédures sont extrêmement liquidatives, note-t-elle. Car, malheureusement, les entreprises viennent au tribunal trop tardivement et leurs chances de rebond sont anéanties ». Cristel Bétremieux rappelle que les procédures de prévention sont gratuites et confidentielles. « Il faut que cela devienne un réflexe, comme aller chez le médecin lorsque la fièvre monte, il faut aller au tribunal lorsque les entreprises rencontrent des difficultés », s'exclame le procureur de la République du Havre, Bruno Dieudonné. 

Les liquidations sur résolution de plan sont en nette augmentation. « Cela démontre, dans le contexte actuel, que la hausse des taux d’intérêt, l'inflation, les coûts supplémentaires liés à l'énergie, mettent en difficulté les trésoreries des entreprises qui avaient réussi à présenter un plan de continuation et qui finissent au bout de quelques annuités remboursées ne plus pouvoir faire face à leur engagement », explique-t-elle. 550 salariés sont concernés par ces procédures, en comparaison à 700 salariés en 2022. 

L'association Apesa recherche
des donateurs pour perdurer

Cristel Bétremieux met également en garde face à l'augmentation du nombre d'alerte Apesa, association qui apporte un soutien psychologique aux chefs d'entreprise en souffrance. « 99 alertes ont été réalisées en 2023 », annonce-t-elle. Pour perdurer, cette association recherche des donateurs. 

Autre indicateur qui démontre les difficultés des entreprises à recouvrer leurs créances est la hausse du nombre d'ordonnances présidentielles, notamment les injonctions de payer, de 35% (1 603 en 2023 contre 1 224 en 2022). 

Le tribunal de commerce du Havre enregistre 11 000 formalités au RCS, dont 1 078 créations d'entreprise de personnes physiques et 835 créations de sociétés commerciales, soit une baisse totale de 10%. Un résultat « lié aux dysfonctionnements du guichet unique », attendu depuis le 1er janvier 2023. 

Le Havre, ville retenue pour devenir
tribunal des activités économiques ?

Pour 2024, le tribunal de commerce du Havre veut continuer ses actions de prévention. « Il conviendra de poursuivre nos efforts et aller à la rencontre des entreprises afin qu'elles puissent prendre conscience que l'anticipation de leurs difficultés est essentielle, s'exclame Cristel Bétremieux. Les procédures amiables doivent être plus largement connues car elles permettent de trouver des accords avec des créanciers. » Deux juges seront dédiés à cette mission sur le territoire.

Alors que l'institution voit son stock d'affaires augmenter, le tribunal de commerce veut travailler à la réduction des délais de traitement des affaires en passant notamment par la dématérialisation et la mise en place d'un calendrier de procédures. 

Par ailleurs, le tribunal de commerce du Havre s'est porté volontaire pour participer à l'expérimentation et devenir tribunal des activités économiques (TAE) pendant 4 ans. La présidente indique que le tribunal de commerce du Havre a reçu un avis favorable. Les villes retenues devraient bientôt être connues.