À Dieppe, La Musardière cultive simplicité et authenticité

Petit restaurant de 38 couverts sur le quai Henri IV, La Musardière vient d’obtenir une toque au Gault & Millau. Le fruit d’un recentrage profond sur l’esprit de la table.

Elodie et Christopher Goasguen dans leur Musardière où ils aiment passer du temps avec leurs clients. (© Aletheia Press / B.Delabre)
Elodie et Christopher Goasguen dans leur Musardière où ils aiment passer du temps avec leurs clients. (© Aletheia Press / B.Delabre)

Une belle surprise. Ni plus, ni moins. Voilà comment Elodie et Christopher Goasguen gérants de La Musardière ont accueilli leur première toque au Gault & Millau. « On travaille sans penser aux récompenses », résume Christopher. Néanmoins, c’est bien le fruit de leur travail et de son évolution que marque cette première toque. Avec le Covid, le couple a en effet remis en question ses méthodes de travail. Confrontés aux fermetures, puis au couvre-feu, ils ont notamment décidé de limiter les heures d’ouverture et le nombre de services. Un seul service au déjeuner comme au dîner. Telle est la règle. Et le restaurant ferme ses portes à 23 h : tout convive doit alors quitter les lieux.

Ces choix dénotent un peu sur la place du port de Dieppe, habitué à accueillir une foule pressée de trouver une table à toute heure. Surtout pour un restaurant doté de seulement 38 couverts. Mais pour Christopher, même en ayant aussi fait le choix de légèrement augmenté la masse salariale, passant de 4 à 6 personnes, « tout le monde y gagne ». Pour l’équipe du restaurant c’est d’abord beaucoup moins de stress et de charge mentale, moins de fatigue…C’est donc aussi du temps pour faire un peu mieux à toutes les étapes, se concentrer sur la qualité de l’assiette. « De freiner ça nous a fait avancer, insiste le jeune gérant du restaurant. Ça a aussi motivé l’équipe. » Et pour le client, c’est la garantie d’un service aux petits oignons, et du temps de convivialité autour de la table.

Recettes de grand-mères

Car c’est cet esprit que le jeune couple, qui sait surprendre par sa carte à la fois traditionnelle et familiale, entend insuffler. « Si on devait résumer La Musardière en quelques mots, ce serait simplicité, convivialité et authenticité », poursuit Elodie. Le plaisir de la table au sens brut du terme, dans sa vision presque Rabelaisienne. Des produits simples mais de qualité, cuisinés à travers des recettes traditionnelles, parfois un peu oubliées, et auxquelles le chef apporte sa petite touche. « La cuisine géométrique, ce n’est pas notre truc », résume encore Christopher. Ainsi peut-on trouver à la carte de la tête de veau, de l’andouillette, ou un coq au vin… Des recettes de grand-mère qui font mouche. Certaines, comme le pain perdu, la soupe de poisson ou la choucroute de la mer, plaisent tellement, qu’elles ne peuvent plus être retirées de la carte sous peine de créer le désespoir des habitués.

« Nous travaillons beaucoup à la réservation, avec notamment le week-end une clientèle parisienne, mais aussi rouennaise ou beauvaisienne », explique Elodie. La toque remportée au guide du Gault & Millau, et la publicité qui en a été faite par la presse locale, ont aussi redonné de la visibilité à la « petite » Musardière, dans le long alignement des restaurants du port. « Les Dieppois nous ont découverts voire redécouverts », sourit la jeune femme.

Garder la ligne

Cette reconnaissance les a aussi rendu très heureux, eux et leur équipe. « Le Gault & Millau, c’est particulier, car c’est vraiment un juge neutre, explique Elodie. On ne sait pas quand l’enquêteur est passé, ce qu’il a mangé… Il ne se présente jamais à nous. » Pas de quoi toutefois leur tourner la tête. La Musardière compte bien poursuivre son bonhomme de chemin sans se préoccuper de ces questions. « Notre seul souci, c’est de faire plaisir à nos clients, insiste Elodie. Plus ils sont contents, et plus on a envie de leur apporter. » Cela passe par le maintien de cet esprit d’authenticité qui les anime, associant la simplicité à des tarifs raisonnables. La quête d’une étoile ou d’une seconde toque, n’entre donc pas dans leurs plans. À moins que les enquêteurs des guides, en décident autrement…

Pour Aletheia Press, Benoit Delabre