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Big Tech : de l’euphorie à la nostalgie !

Baisse du chiffre d’affaires, cours de bourse déprimés, suppressions massives d’emplois… Le monde des technologies numériques subit de plein fouet sa première grande crise.

Big Tech : de l’euphorie à la nostalgie !

Avis de gros temps dans le secteur des technologies numériques : depuis 2022, la tendance est aux licenciements de masse ! 18 000 chez Amazon, 12 000 chez Google, 11 000 chez Meta (maison-mère de Facebook), 10 000 chez Microsoft…. Un entrepreneur californien, Roger Lee, a d’ailleurs eu l’idée de créer un site web (Layoffs.fyi) pour tenir le compte des licenciements survenus dans la Tech mondiale. Et le résultat est édifiant : 1 000 entreprises ont licencié près de 160 000 salariés en 2022 ! C’est beaucoup, mais finalement très peu par rapport à l’emploi total. Pourtant, il n’est question que de cela.

Capitalisations boursières en berne

Avant la pandémie, la Tech semblait ne jamais devoir connaître la crise. Et les confinements, loin d’avoir desservi le secteur, auront joué le rôle de catalyseurs boursiers, les investisseurs cherchant des opportunités de rendements dans un contexte de taux d’intérêt bas. Il est vrai qu’avec la fermeture de nombre de commerces — on garde en mémoire l’imbroglio français des « commerces non essentiels » —, c’est un véritable eldorado qui avait été offert aux vendeurs en ligne. Rien d’étonnant donc à ce qu’en juillet 2021, Apple, Microsoft et Amazon se disputaient le titre de la plus importante valorisation boursière dans le monde à hauteur de 1 900 milliards de dollars !

Mais, depuis la fin des confinements, leur chiffre d’affaires est revenu à un rythme de progression moins effréné, d’où des désillusions sur le Nasdaq américain. Ainsi, après une correction sévère au premier semestre 2022, suivie d’une reprise forte durant l’été, les actions des big Tech (Amazon, Microsoft, Apple, Meta…) ont replongé au second semestre. Au total, en 2022, environ 30 % de leur capitalisation boursière sont partis en fumée ! Bien entendu, de telles déconvenues sur des titres phares ont fait plonger l’indice Nasdaq 100, déclenchant des conséquences en cascade pour les investisseurs et les entreprises cotées. Quant aux entreprises non cotées du secteur, les levées de fonds sont plus difficiles et les investisseurs exigent désormais que les start-up deviennent rapidement rentables.

Des doutes sur le modèle d’affaires

Un doute a alors émergé sur la solidité des modèles d’affaires de toutes ces entreprises de la Tech, qu’elles soient cotées ou non. Quelles sont réellement leurs perspectives de croissance ? N’ont-elles pas trop embauché avant et surtout pendant la pandémie, pour répondre à une demande éphémère ?

Andy Jassy, PDG d’Amazon, a ainsi évoqué « une économie incertaine et difficile », traduction enrobée de la chute impressionnante du résultat opérationnel du groupe sur l’année 2022, avec des embauches trop nombreuses durant la pandémie. Quant à Meta, dont le nombre de salariés a également fortement augmenté pendant cette période où sévissait la Covid-19, il subit de plein fouet le ralentissement du marché publicitaire, au moment même où Facebook et Instagram subissent la concurrence frontale du chinois TikTok.

Quoi qu’il en soit, les services ne sont pas les seuls touchés dans le monde de la Tech. Les ventes physiques le sont également, comme le montrent les déboires de Microsoft qui subit tout à la fois le ralentissement de la vente de PC, des consoles de jeux et des jeux vidéo. C’est d’ailleurs peut-être le mélange software/hardware qui explique une relative résilience du modèle d’affaires d’Apple : outre une moindre dépendance à la publicité, en raison du fort sentiment communautaire des utilisateurs de produits Apple, les services proposés sont complémentaires de ses produits maison (iPhone, iPad…).

En ce qui concerne Twitter, la société fait autant parler d’elle pour les frasques de son nouveau dirigeant que pour ses déboires financiers bien réels, qui ont conduit Elon Musk à licencier sans ménagement un salarié sur deux : « il n’y a malheureusement pas d’autre choix quand l’entreprise perd plus de 4 millions de dollars par jour ». Hélas, en coupant dans tous les services (communication, data science…) et en annonçant des projets qui sont loin de faire l’unanimité, comme l’abonnement payant ou l’assouplissement des règles de modération, il aura surtout réussi à rendre le projet de l’entreprise illisible.

Assurément, le contexte économique actuel est défavorable au secteur de la Tech. En effet, la remontée des taux d’intérêt renchérit les futurs emprunts et incite les investisseurs à vendre leurs actions, tandis que l’inflation pèse sur le pouvoir d’achat des consommateurs, rendant la publicité moins rentable. Enfin, la débâcle des cryptoactifs, univers parallèle dans lequel beaucoup des entreprises de la Tech se sont engouffrées, pourrait causer des dégâts collatéraux. Et quid de la question énergétique/écologique, lorsque l’on sait combien de matériel physique il faut dans cet univers pourtant réputé dématérialisé ?

En fin de compte, face à une crise majeure, le secteur de la Tech aura usé des mêmes méthodes que les secteurs traditionnels : licenciements en masse et plans d’économie !