Collectivités : stades et piscines à l’épreuve de la flambée des prix

Avec l’explosion des coûts de l’énergie, les collectivités locales risquent d’avoir du mal à assurer l’ouverture au public d’infrastructures sportives souvent vieillissantes. Une étude BPCE l’Observatoire livre une vision exhaustive de la situation.

Le premier signal d’alarme a retenti le 5 septembre dernier : une trentaine de piscines publiques ont été contraintes de fermer, en raison de l’incapacité de leur société exploitante à assumer la hausse des prix de l’énergie. L’étendue des difficultés potentielles des collectivités locales face aux enjeux de la gestion des infrastructures sportives dans le contexte de crise énergétique et d’inflation est mesurée par l’étude « la filière sport : les challenges d’une championne ». Cette dernière, réalisée par BPCE l’Observatoire, a été rendue publique le 26 janvier à Paris, lors d’une conférence de presse.

Tout d’abord, rappelle l’étude, le rôle des collectivités locales dans le sport est essentiel. Si le secteur public dans son ensemble représente un total de 20 milliards d’euros de financement annuels pour le sport, 12,5 milliards sont le fait des collectivités locales. Et ces dernières possèdent 81 % des équipements sportifs (de nature et dimension très variables) répertoriés en France. Dans ce cadre, communes et EPCI sont en première ligne. Toutefois, le secteur privé est en train d’accroître sa présence. Il détient actuellement 8 % des infrastructures sportives, mais ce taux grimpe à 20 % pour celles qui ont ouvert depuis 2005.

Autre constat de l’étude, le parc français comporte des infrastructures assez disparates en termes d’âge, un enjeu fort, dans le contexte actuel de choc énergétique. Quelque 50 000 équipements sont très anciens. Un tiers du parc date d’avant 1985 et n’a pas jamais été rénové de manière significative. En revanche, 26 % du parc a été rénové ou date d’après 2005. « Beaucoup a été fait en matière de rénovation.Toutefois, un effort important reste à fournir », explique Alain Tourdjman, directeur des études et prospective du groupe bancaire BPCE. Par ailleurs, « ce sujet concerne une bonne partie du territoire, dans des zones qui sont très différentes », poursuit-il. Ainsi, des zones très urbanisées comme l’Île-de-France, sont dotées d’équipements anciens, mais c’est aussi le cas de territoires ruraux, à l’image de la Haute-Savoie.

1,5 milliard d’euros de surcoût pour les communes

Autre enjeu de taille, le mix énergétique des équipements fermés est très loin d’être optimal. « Les deux tiers d’entre eux sont équipés d’un chauffage à énergie fossile », pointe Alain Tourdjman. Ceux qui datent d’après 2005 ont intégré plus de recours à des énergies alternatives, mais la part de celles fossiles reste très importante. Et c’est également le cas des équipements certifiés HQE, Haute qualité environnementale. « Le sujet de la rénovation énergétique concerne une part très importante des infrastructures sportives », résume Alain Tourdjman. Parmi les différents types d’équipements, seules les piscines ont pris de l’avance sur ce sujet, mais les trois quarts d’entre elles conservent un mix énergétique traditionnel…Résultat, le choc énergétique actuel déstabilise la gestion financière des infrastructures, à commencer par les piscines. En effet, celles-ci constituent déjà l’équipement le plus onéreux, avec 270 000 euros de frais annuels de fonctionnement (avant la crise) – près de 10 fois plus qu’une salle de sport. Avec l’inflation, l’addition monte à 320 000 euros, soit 16 % de plus que le montant habituel. Pour les salles de sport et les gymnases, les frais augmentent de 23 % pour atteindre 36 000 euros. Au global, l’étude estime le surcoût lié à l’inflation à 1,5 milliard d’euros pour le budget consacré aux activités sportives des collectivités territoriales (essentiellement communes et intercommunalités). L’énergie compte pour 56 % de la somme. « Le choc aurait pu être encore plus important si les collectivités n’avaient pas réalisé des travaux de rénovation massifs ces dernières années », remarque Julien Laugier économiste au sein du groupe BPCE. Pour lui, la situation actuelle génère plusieurs risques : restriction du service public, baisses de subventions à des associations et réduction des investissements. A contrario, la situation pourrait produire des effets positifs en incitant les collectivités à accroître la coopération entre communes pour proposer des services au niveau intercommunal et à accélérer la transition énergétique de leurs infrastructures. Le sport constitue actuellement le deuxième poste de dépenses des communes, derrière l’éducation. Il représente 10 % des budgets et 15 % des investissements. Au final, estime Julien Laugier, « le sport ne devrait pas être plus pénalisé, plus sacrifié que d’autres domaines de la politique locale, car il constitue une priorité pour les élus ».