Entreprises et cotisations sociales : du côté des tribunaux

Entreprises et cotisations sociales : du côté des tribunaux

Revue de récentes décisions en  matière de contrôles et redressements Urssaf.

Les limites de l’avis de contrôle

Il ne résulte d’aucune disposition que l’Urssaf était tenue de préciser, dans l’avis de contrôle qui a été envoyé, le périmètre des entreprises du groupe visé par le contrôle. (Angers, Chambre sociale, 30 juin 2020, RG 18/00805)

Les limites des précisions de la lettre d’observations

Contrairement à ce que soutient la société, l’Urssaf n’était pas tenue de mentionner, dans la lettre d’observations, le montant des majorations et pénalités de retard, puisque l’organisme n’a pas retenu de majorations et pénalités se rapportant à  une absence de conformité, à un recours à du travail dissimulé ou à une procédure de répression d’abus de droit. (Nîmes, Chambre sociale, 30 juin 2020, RG n° 18/01801)

Aucune obligation de communiquer le rapport de contrôle

Il n’est nullement fait obligation à l’Urssaf de communiquer le rapport de contrôle. La communication de la lettre d’observations suffit à respecter le principe du contradictoire. (Angers, Chambre sociale, 30 juin 2020, RG n° 17/00655 17/00542)

Une différence de montant entre les observations et la mise en demeure peut entraîner la nullité de la mise en demeure

 En l’espèce, l’Urssaf n’avait, à aucun moment, expliqué le surplus de 1 442 euros sur le montant du redressement, entre la lettre d’observations (166 727 euros) et la mise en demeure (168 169 euros). Dans ces conditions, la mise en demeure visant un montant de cotisations différent de celui préalablement notifié au cotisant, ne permettait pas à ce dernier de connaître la nature, la cause et l’étendue de son obligation au sens de l’article L 244-2 du Code de la sécurité sociale. En conséquence, la mise en demeure devait être annulée. (Paris, Pôle 6 – Chambre 12, 5 juin 2020, RG n°16/11569)

Le travail dissimulé ne nécessite pas d’intention frauduleuse

Il résulte des articles L. 242-1 et L. 242-1-2 du Code de la sécurité sociale que s’il procède du constat d’infraction de travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié, le redressement a pour objet exclusif le recouvrement des cotisations afférentes à cet emploi, sans qu’il soit nécessaire d’établir l’intention frauduleuse de l’employeur. (Nancy, Chambre sociale / section 1, 16 juin 2020, n°19/02110)

Remise des majorations de retard : compétence

En ce qui concerne les majorations de retard, le directeur de l’organisme de recouvrement, est seul compétent pour statuer sur leur remise. (Lyon, Protection sociale, 23 juin 2020, RG n°18/08931)

Une mise en demeure précise

La mise en demeure, invitation impérative adressée au débiteur d’avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti, doit permettre à celui-ci d’avoir connaissance de la nature, de la cause et de l’étendue de son obligation. A cette fin, il importe qu’elle précise, à peine de nullité, outre la nature et le montant des cotisations sociales réclamées, la période à laquelle elles se rapportent, sans que soit exigée la preuve d’un préjudice. 

Une mise en demeure se référant à des observations antérieures est valable

Les prescriptions légales sont respectées lorsque la mise en demeure, en indiquant, par référence au contrôle qui l’a précédée, la nature, la période, le montant et l’origine de la dette, permet à l’employeur de connaître la nature, la cause et l’étendue de son obligation. (Paris, Pôle 6 Chambre 13, 12 juin 2020, RG n° 16/06921 16/06919, 16/06917, 16/06915, 16/06912, 16/06910)

Pas de contrainte sans mise en demeure

L’organisme de sécurité sociale a manqué à ses obligations en ne procédant pas à la notification régulière de la mise en demeure qui précède l’établissement et la signification de la contrainte, qui a fait l’objet d’une opposition : la contrainte doit être annulée. (Nancy, Chambre sociale – section 1, 16 juin 2020, n° 19/02178)

Contenu de la mise en demeure et de la contrainte

La connaissance exacte par le cotisant de la nature, de la cause et de l’étendue de son obligation doit s’apprécier au regard de la lecture combinée de la mise en demeure et de la contrainte. (Orléans, Chambre des affaires de sécurité sociale, 9 juin 2020, RG n° 18/02179, 18/02177)

La contrainte émise pour un montant supérieur à celui de la mise en demeure à laquelle elle se réfère, ne permet pas au cotisant de connaître la nature, la cause et l’étendue de son obligation : le jugement annulant la contrainte est confirmé. (Orléans, Chambre des affaires de sécurité sociale, 9 juin 2020, RG n° 18/02179)

Motivation de la contrainte 

La motivation de la contrainte peut résulter de la simple référence à une mise en demeure adressée préalablement au débiteur, à condition toutefois que la contrainte soit précise,  quant à la mise en demeure à laquelle elle renvoie le débiteur, pour connaître la cause, la nature et le montant des sommes réclamées. (Lyon, Protection sociale, 23 juin 2020, RG n°18/08931)

Contrainte et acte de signification de la contrainte : un montant identique

Un acte de signification de contrainte pour un montant différent de celui figurant sur la contrainte elle-même, sans comporter d’élément permettant d’expliquer cette différence est de nature à faire obstacle à la validation de la contrainte. (Nancy, Chambre sociale / section 1, 16 juin 2020, n° 19/02178/ 30 juin 2020, RG n° 19/01763)

François TAQUET, avocat,
spécialiste en droit du travail et protection sociale