Fortes tensions de recrutement des cadres

Malgré le climat d’incertitude et les fortes tensions sur le marché de l’emploi cadre, la bonne dynamique de recrutement de cadres devrait se poursuivre en 2022, selon le point de conjoncture de l’Apec.

(© Adobe Stock)
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Les entreprises peinent toujours à recruter : 84% d’entre elles anticipent leurs recrutements de cadres, ce quatrième trimestre, comme difficiles et 38% comme très difficiles*. Pour rappel, elles n’étaient que 56% à les prévoir comme tel en septembre 2020 et 11% à les juger très difficiles. Les tensions seraient particulièrement exacerbées dans les familles de métiers à forte valeur ajoutée, notamment dans la fonction informatique (67 % des recrutements prévus jugés difficiles), les études et la recherche et développement et l’exploitation tertiaire, qui représentent à eux trois près d’un recrutement de cadre sur deux.

En termes géographiques, aucune région n’échappe à ces tensions, mais certains territoires, comme l’Occitanie, l’Auvergne-Rhône-Alpes ou encore la Bretagne apparaissent toutefois plus fortement exposés. Leur point commun ? Un tissu économique riche en services à forte valeur ajoutée et en activités industrielles à haute intensité technologique. La solution avancée par l’Apec ? « Travailler sur les axes ‘compétences’ du côté des candidats comme des entreprises », via le mentorat, le recrutement sans CV, l’élargissement du vivier professionnel ou la facilitation des transitions professionnelles.

Bonne dynamique dans les ETI et les grandes entreprises

Malgré ces tensions toujours très élevées en termes de recrutement et l’incertitude économique quant à l’évolution de la crise géopolitique, aux craintes sur les approvisionnements et au coût de l’énergie, les intentions d’embauche rebondissent pour le quatrième trimestre 2022**, notamment dans les grandes structures et ETI (62 % d’intentions à trois mois ; + 6 points) et les PME (19 % ; + 4 points). Dans les TPE, les intentions de recrutement sont stables (64%;- 6 points), probablement en lien avec leur « vulnérabilité financière » et une « moindre confiance en leur trésorerie » qu’au trimestre précédent.

Après un très bon millésime 2021, la bonne santé du marché de l’emploi cadre devrait donc perdurer : les entreprises prévoient de recruter 282 000 cadres en 2022 (+5 % sur un an), les difficultés macroéconomiques persistantes n’ayant pas freiné significativement les entreprises. Dans les ETI et les grandes entreprises, qui ont toujours été les plus dynamiques en matière d’embauches de cadres, le taux de recrutement s’est maintenu à haut niveau (65 %) au troisième trimestre 2022. Mais la dynamique a été également tirée par les PME (26 % ; + 7 pts) et les TPE (9 % ; + 6 pts) qui n’ont jamais été si nombreuses, depuis le début de l’étude en décembre 2020, à avoir embauché des cadres. Au total, 16 % des entreprises ont finalisé au moins un recrutement de cadre pendant la période estivale, soit 5 points de plus qu’au trimestre précédent et 6 points de plus qu’il y a un an. Le volume d’offres d’emploi cadre diffusées sur le site apec.fr confirme cette bonne dynamique. Dynamique qui s’observe dans la plupart des grands secteurs d’activité (+ 15 % dans le commerce, + 19 % dans l’industrie, + 22 % dans les services), à l’exception de la construction.

Confiance des cadres

De leur côté, les cadres ont conscience que la dynamique du marché de l’emploi leur est particulièrement favorable et affichent leur confiance. Plus de la moitié de ceux en poste (53 %) estiment pouvoir retrouver facilement un emploi s’ils venaient à changer d’employeur. Une confiance bien plus élevée chez les cadres informaticiens (66 %), en écho aux difficultés que rencontrent les entreprises pour ce type de profils. Ce sont ceux qui sont en poste dans les grandes régions métropolitaines (Île-de-France, Auvergne-Rhône-Alpes) qui se montrent les plus optimistes. Ces territoires se qualifiant par une très forte densité économique favorisant les opportunités de changement d’entreprise.

Néanmoins, une majorité de cadres (65%) s’inquiètent de l’évolution de leur pouvoir d’achat. En conséquence, près de la moitié d’entre eux (43%) ont l’intention de demander une augmentation d’ici fin 2022. Les salaires font ainsi partie des informations les plus recherchées pour leur vie professionnelle par plus d’un tiers d’entre eux. Une préoccupation qui pourrait également les inciter à s’ouvrir davantage aux nombreuses opportunités d’emploi. Ainsi, 38 % ont envisagé de changer d’entreprise au cours du troisième trimestre (+ 4 points) et près de la moitié d’entre eux (46%) se déclarent en veille sur le marché de l’emploi (+ 4 points). Ils sont par ailleurs de plus en plus sollicités par les cabinets de recrutement, avec 33% qui ont été contactés dans les trois derniers mois (+ 5 points par rapport à septembre 2021). Quel que soit leur âge, ils sont de plus en plus nombreux à s’ouvrir à l’idée d’une mobilité externe : une posture de veille courante chez les cadres de moins de 35 ans (48 %) et chez leurs aînés de 35 à 54 ans (50 %), et dans une moindre mesure pour les plus de 55 ans (32 %).

* Etude d’après une enquête annuelle, menée entre décembre 2021 et janvier 2022, auprès d’un échantillon permanent de 8 500 entreprises ; une enquête annuelle menée en février 2022 auprès de 13 000 cadres du secteur privé ; l’exploitation des offres d’emploi cadre publiées sur apec.fr au cours du 1er semestre 2022 et l’exploitation de l’enquête Emploi 2020 réalisée par l’Insee et de la DSN.

** D’après l’exhaustivité des postes cadres distincts publiés sur apec.fr par trimestre et d’après deux enquêtes menées du 5 au 16 septembre 2022 : une enquête en ligne menée auprès d’un échantillon de 2 000 cadres et une enquête téléphonique auprès d’un échantillon de 1 000 entreprises, employant au moins un cadre.

Charlotte DE SAINTIGNON