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L'IA, couteau suisse du commerce ?

Améliorer les performances des commerciaux, générer des fiches produits... Les usages de l'intelligence artificielle (IA) sont multiples, ont témoigné plusieurs professionnels sur le salon Tech for retail, à Paris.

© Adobe Stock.
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L'IA, c'est aujourd'hui. Plusieurs professionnels sont venus témoigner de leurs démarches lors d'une table-ronde consacrée à l’« AI comme moteur de transformation du commerce ». C'était dans le cadre du salon Tech for retail, fin novembre 2023 à Paris.

Petit rappel, « il existe deux IA », précise David Galley, directeur associé du BCG X, entité du Boston Consulting group, société de conseil, recourant à la métaphore du « cerveau gauche » et « droit ». La première IA, qui a connu son essor vers 2015, fondée sur le machine learning, est « prédictive ». Elle permet, par exemple, de prévoir un retour sur investissement sur un marché. La seconde, celle actuelle, plus créative, est dite « générative » : elle permet de développer résumés, synthèses.... « C'est parti. Aujourd'hui, tout le monde teste », annonce David Galley. Exemples chez les distributeurs : Walmart utilise l'IA pour négocier avec ses fournisseurs. Carrefour a lancé Hopla, un robot basé sur l'IA pour aider les clients à faire leurs courses, conciliant budget, contraintes alimentaires et idées de menus.

Chez Pernod Ricard, l'IA est utilisée pour « optimiser les tournées des forces de vente », explique Pierre-Yves Calloc’h, responsable du numérique de l'entreprise. Le marché est concurrentiel et l'offre du groupe, vaste (140 marques). Les commerciaux sont équipés d'un outil basé sur l'IA qui les aide à identifier les points de ventes où les opportunités sont les plus importantes, afin de prioriser les visites. Il propose aussi des « actions personnalisées » pertinentes : pousser une référence nouvelle... « Nous avons élaboré un clustering des points de vente à partir d'une grande quantité de données », dévoile Pierre-Yves Calloc’h. Les points de ventes qui présentent des caractéristiques similaires, appartenant à un même « cluster », sont supposés se comporter de la même manière, ce qui permet d'ajuster les propositions commerciales. « Cela marche ! L'impact sur les ventes est significatif », se réjouit le responsable.

Dilemme technologique

Autre exemple, celui de Fnac-Darty. L'IA ? « Nous sommes engagés depuis plusieurs années dans ce sujet », confirme Olivier Theulle, responsable numérique et e-commerce du groupe. Déjà, il a développé plusieurs types d'outils qui ont nécessité la constitution d'un socle de données conséquent. Exemple, le moteur de recherche sur Internet. « Nous disposons de millions de références. Nous avons fait beaucoup d'efforts pour mieux comprendre l'intention du consommateur », illustre Olivier Theulle. Aujourd'hui, l'entreprise utilise l'IA générative notamment pour générer du contenu, « des résumés pertinents pour les fiches articles » ou pour modérer les contenus rédigés par des utilisateurs. Par ailleurs, « nous avons relancé de nouveaux tests », poursuit Olivier Theulle. Une équipe de codeurs utilise des outils d'IA générative. « Les équipes sont enthousiastes. Mais cela prendra un peu plus de temps pour évaluer l'impact réel », juge-il. Les projets du groupe, en matière d'application de l'IA couvrent un champ immense : gestion des contacts à distance avec les clients (10 millions par an), promotions, politique de prix...


Toutefois, ces professionnels en sont bien conscients, cette technologie comporte de nombreux risques en matière de sécurité économique, propriété intellectuelle, responsabilité sociétale... Par exemple, « notre produit est un produit où la consommation responsable est très importante. En termes de réputation et de responsabilité, nous ne pouvons pas nous permettre d'avoir un chatbot dont nous ne maîtrisons pas parfaitement le fonctionnement », illustre Pierre-Yves Calloc’h. Avec, aussi ce dilemme, inhérent à toute innovation technologique : « Les risques sont importants. Il y a celui de ne pas bouger assez vite, ou celui de faire des bêtises, parce que l'on ne maîtrise pas », pointe Olivier Theulle.