Les petites entreprises ont massivement adopté le télétravail

La crise sanitaire a durablement modifié l’organisation du travail puisque la pratique du télétravail s’est, depuis, globalement renforcée dans les TPE et les PME, selon une récente enquête flash de Bpifrance Le Lab.

Trois quarts des dirigeants ayant expérimenté ou accru le recours au télétravail pendant la crise comptent pérenniser, au moins partiellement, le surplus de jours de télétravail autorisés, par la suite. Ainsi, 28 % pensent maintenir le nombre de journées en distanciel au même niveau qu'en plein Covid et 46 % comptent en pérenniser une partie. Les dirigeants qui avaient déjà recours au télétravail avant la crise ont en partie renforcé le dispositif au sein de leur entreprise. Ainsi, fin 2021, 38 % d’entre eux avaient augmenté le nombre de jours moyens accordés par rapport à la situation d’avant crise. Au total, les dirigeants autorisaient en moyenne 1,3 jour de télétravail par semaine, contre 0,75 jour avant la crise. L’enquête flash* Bpifrance Le Lab – laboratoire d’idées pour les PME-ETI– révèle ainsi le renforcement du télétravail au sein des TPE et PME, alors qu’il était largement minoritaire dans ces entreprises avant la crise sanitaire. Ainsi, alors que 27 % seulement des TPE et PME avaient recours au travail en distanciel avant le début de la crise, la proportion est montée à 46 % pendant le Covid. La cause principale, alors : la mise en place des mesures de restriction des déplacements.

Des salariés aussi productifs pour la majorité des dirigeants

Pour Sabrina El Kasmi, responsable du pôle "Conjoncture-Macroéconomie" au sein de Bpifrance Le Lab, « la majorité des dirigeants de TPE-PME envisagent de pérenniser la pratique qui, pour une large partie d’entre eux, n’apparaît pas défavorable à la productivité de leur entreprise ». Les dirigeants estiment, en effet, que le modèle n’a aucun impact sur leur productivité : 52 % considèrent que leurs salariés sont autant productifs en télétravail que sur site et 7 % jugent même qu’ils le sont davantage. À contrario, il faut noter que 26 % des dirigeants les trouvent moins productifs lorsqu’ils travaillent depuis chez eux et que 15 % ne savent pas évaluer la productivité comparée selon le mode d’organisation choisi. Néanmoins, si ces derniers ont un certain recul après deux années de crise sanitaire, ceux ayant déjà expérimenté le télétravail avant la crise restent les plus à même de juger leurs salariés plus productifs ou non en travail à domicile que sur site. Son « caractère précipité et contraint » et ses conditions de mise en place pendant la crise n’ayant pas été des plus favorables : non-concertation, manque de préparation, de moyens techniques, etc. « Ce qui a pu en limiter l’éventuel impact positif sur la productivité (Bergeaud et al., 2021) », signalent les auteurs de l’étude.

Si les effets du télétravail sur la productivité restent incertains, des facteurs positifs se dégagent, tels que la suppression des trajets domicile-travail, la baisse du besoin de capital foncier pour les entreprises, ou l’accélération du recours aux technologies digitales. Même si dans le même temps, le télétravail engendre « des flux informationnels réduits, pénalisant notamment la qualité de la formation », note les auteurs de l’étude.

Les TPE/PME franciliennes de services les plus enclines à la pratique

Dans le détail, les secteurs qui étaient les plus adeptes du télétravail avant la crise étaient les services. Leurs tâches étant jugées « plus compatibles » avec ce mode d’organisation du travail. Le secteur avait déjà initié la pratique avant le Covid (40%, contre 19% hors services), et l’a donc plus naturellement développé en période post crise. En termes géographiques, les TPE-PME franciliennes seraient plus nombreuses à autoriser et à pérenniser le télétravail. Ainsi, une TPE-PME francilienne a deux fois plus de chances de poursuivre la pratique qu’une TPE-PME d’une autre région, indépendamment du secteur ou de la taille de l’entreprise. Autre enseignement notable, les TPE-PME innovantes et les exportatrices étaient également plus à même de proposer du travail à distance à leurs salariés avant la crise. Si la taille de l’entreprise n’influençait alors pas la probabilité d’usage du dispositif, post crise, ce sont bien les PME les plus grosses qui ont le plus développé le distanciel. Ainsi, fin 2021, une PME de 50 à 99 salariés avait environ cinq fois plus de chance de pratiquer le télétravail qu’une TPE de moins de 10 salariés, et une PME de plus de 100 salariés une probabilité de s’y adonner sept fois supérieure à celle des TPE.

*Bpifrance Le Lab, 74ème enquête auprès des PME réalisée auprès de 2 913 dirigeants interrogés entre le 15 et le 29 novembre 2021

Charlotte DE SAINTIGNON