RSA : des propositions de la Cour des comptes pour améliorer le dispositif

La Cour des comptes vient de publier son rapport sur l’évaluation du revenu de solidarité active (RSA). Elle pointe ses réussites et ses limites, et propose des pistes d’amélioration du dispositif.

Photo d'illustration Adobe Stock
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« C’est la première fois que les juridictions financières réalisent une évaluation sur un dispositif de prestations sociales de cette importance », a souligné le président de la Cour des comptes, Pierre Moscovici, lors de la présentation du rapport sur l’évaluation du revenu de solidarité active, le 13 janvier dernier. Un peu plus de dix ans après la généralisation du dispositif en métropole (2009) et en Outre-mer (2011), cette évaluation « particulièrement ambitieuse » paraissait « plus que jamais nécessaire » dans un contexte d’augmentation du nombre de bénéficiaires et de crise sanitaire.

Des dépenses qui progressent beaucoup plus vite que les recettes allouées

Le RSA « a profondément transformé le panorama des minima sociaux », a déclaré le président de la Cour, avant de rappeler les objectifs que le législateur avait fixés à ce dispositif qui est venu remplacer le RMI en 2008 : assurer à ses bénéficiaires des moyens d’existence, afin de lutter contre la grande pauvreté, encourager l’activité professionnelle, notamment par le biais de la prime d’activité, et faciliter l’insertion sociale des allocataires.

En l’espace de dix ans (2009-2019), le nombre de bénéficiaires du RSA a augmenté de plus de 46%. Il a atteint 2,1 millions en 2020. Or, « cette hausse pose la question du financement », dans la mesure où les dépenses (15 milliards d'euros par an) ont progressé beaucoup plus vite que les recettes allouées aux départements. Dans certains départements, cette pression financière a entraîné une renationalisation du dispositif, « déjà effective en Guyane et à la Réunion, programmée en Seine-Saint-Denis », où c’est l’État qui finance l’allocation, alors que le département conserve la décision d’attribution et la gestion du parcours d’insertion. Comme elle l’a déjà fait pour l’allocation adulte handicapé, la Cour des comptes rappelle qu’elle n’est pas favorable à cette dissociation entre le décideur et le financeur.

Le RSA permet de lutter contre la grande pauvreté et encourage l’activité

« Indépendamment de la question de son financement, celle de ses conditions d’attribution, en particulier l’âge minimum, fixé à 25 ans, fait débat aujourd’hui », a poursuivi Pierre Moscovici. Dans la mesure où d’autres dispositifs permettent aux jeunes de 18 à 25 ans de bénéficier d’un revenu de base s’ils suivent un parcours d’insertion, « la question de savoir si le RSA doit être ouvert dès 18 ans nous semble relever moins d’un enjeu de politique publique que d’un choix de société, de valeurs. La Cour peut éclairer ce débat mais elle n’a pas vocation à le trancher. »

Selon le rapport d’évaluation, « le RSA a deux mérites majeurs : il protège efficacement contre la grande pauvreté et permet de supprimer les trappes à inactivité par une incitation monétaire à la reprise du travail ». Ainsi, seuls 16% des bénéficiaires du RSA vivent avec moins de 40% du revenu médian, « ce qui ne veut pas dire que l’on vit bien avec le RSA, mais que celui-ci joue son rôle d’ultime recours », a-t-il précisé. De plus, l’incitation monétaire à reprendre une activité fonctionne, grâce notamment à la suppression des effets de seuil et à l’augmentation, en 2019, de la prime d’activité : « contrairement à une idée reçue tenace, il est toujours gagnant de reprendre une activité avec le RSA ».

Des résultats décevants en termes de retour à l’emploi

L’évaluation de la Cour des comptes pointe néanmoins plusieurs « faiblesses » du dispositif : un taux de non-recours trop élevé (autour de 30%, dont des non-recours volontaires), un accompagnement social et professionnel insuffisant (seuls huit allocataires sur 10 en bénéficient, avec de très fortes disparités entre départements et un fort taux d’absentéisme aux rendez-vous fixés par les services sociaux) et des résultats décevants en termes de retour à l’emploi (un bénéficiaire sur six est présent dans le dispositif depuis plus de 10 ans). « La promesse du retour à l’emploi n’est pas tenue pour les deux tiers des allocataires ».

Des voies d’amélioration du dispositif

Dans son rapport, la Cour émet un certain nombre de recommandations pour améliorer le dispositif. Elle propose tout d’abord de réformer le financement du RSA, afin que les départements soient entièrement responsables du dispositif. « La situation dans laquelle ‘l’État finance mais le département décide’ ne peut que générer un risque sérieux de dérive de la dépense et un contrôle structurellement faible de l’attribution à bon droit », a pointé Pierre Moscovici. Autre recommandation : tenter de réduire le taux de non-recours. « Cela passe par une démarche de simplification, de clarté, de publicité de l’allocation et d’engagement envers les allocataires potentiels. » Enfin, le troisième axe d’action vise à améliorer l’accompagnement vers l’emploi, en redonnant « leur pleine signification aux droits et devoirs prévus par la loi », c’est-à-dire, « en renforçant l’accompagnement des personnes les plus en difficulté, en contrepartie d’une formalisation précise et d’une sanction effective des obligations inscrites dans les contrats d’accompagnement ».