En Italie, « les supermarchés milanais qui réduisent leur gaspillage alimentaire bénéficient de réductions d'impôts »

Deux associations, Slow Food et Zero Waste Europe, publient un guide en ligne qui s'adresse aux municipalités. Dans la mise en place de systèmes alimentaires locaux, elles peuvent contribuer à réduire le gaspillage alimentaire, qui concerne 20% de la production européenne.

Trois questions à Madeleine Coste, responsable de plaidoyer chez Slow Food.
Trois questions à Madeleine Coste, responsable de plaidoyer chez Slow Food.

En quoi les villes sont-elles concernées par le gaspillage alimentaire ?

Aujourd'hui, on estime que 20% de la production alimentaire en Europe est gaspillée. Cela constitue à la fois un immense problème alimentaire, éthique et écologique. De plus, les chiffres sont sans doute sous-estimés, car une partie au moins du gaspillage qui advient durant le processus de production n'est pas comptabilisé. Vu son ampleur, éviter de générer ce gaspillage devrait donc constituer une priorité ! Les villes disposent des moyens de le faire lorsqu'elles adoptent une approche holistique de l'alimentation. Par exemple, quand elles mettent en place des stratégies qui prévoient l'amélioration de la nourriture dans les cantines scolaires, qu'elles favorisent la distribution via les marchés ou la promotion des circuits courts, avec le développement des AMAP, Associations pour le maintien d'une agriculture paysanne...De facto, favoriser la production locale réduit le gaspillage, une partie de celui-ci étant lié au stockage et au transport.

Combien ces collectivités sont-elles déjà actives ?

Aujourd'hui, de plus en plus de villes mènent ce type de démarche. C'est notamment le cas des 200 qui ont adhéré au « Pacte de Milan », noué au terme de l'exposition universelle consacrée à l'alimentation qui s'est tenue dans la ville, en 2015. Parmi les signataires : Montpellier, Milan, mais aussi Mouans-Sartoux, en PACA. Cette petite ville de 10 000 habitants a réduit son gaspillage alimentaire. Son objectif initial consistait à convertir l'alimentation de sa cantine scolaire au bio. Elle y est parvenue, et en proposant des prix moins chers qu'auparavant, notamment en réduisant le gaspillage ! En fait, sa démarche s'inscrit dans une réflexion globale sur l'alimentation. La ville est allée jusqu'à acheter une ferme et salarier trois personnes pour approvisionner la cantine. Il s'agit d'une solution viable à petite échelle. En Italie, Milan, qui compte 1,4 million d'habitants, a développé d'autres outils dans le cadre de la politique globale de l'alimentation, mise en place en 2018. Par exemple, la ville a instauré une incitation financière : les supermarchés milanais qui réduisent leur gaspillage alimentaire bénéficient de réductions d'impôts. Ils sont nombreux à avoir rejoint le projet.

Pourquoi vos deux associations, Slow Food et Zero Waste, se sont-elles associées pour proposer ce guide ?

A l'origine, nos deux associations s'intéressent à des causes différentes, mais ce qui nous réunit, c'est la promotion de systèmes alimentaires durables. En effet, Zero Waste, qui lutte contre la production de déchets, part du constat que le gaspillage alimentaire est avant tout la conséquence d'un système alimentaire qui n'est pas durable. Logiquement, l'association milite donc en faveur d'un système de production différent, en circuit court. De notre côté, chez Slow Food, nous nous battons pour une alimentation qui soit bonne pour le consommateur, la planète, et pour ceux qui la produisent. Aujourd'hui, nous considérons que nos sociétés ont favorisé un système de production industrialisé, basé sur la monoculture, qui n'attribue pas à l'alimentation la valeur qu'elle devrait avoir et dont le gaspillage est l'une des conséquences.