Au Havre, l’ENSM se chauffe à l'eau de mer

Au Havre, l’Ecole nationale supérieure maritime utilise, depuis 2015, la thalassothermie pour chauffer et refroidir ses locaux. Un dispositif innovant.

Frédéric Blond en charge de la maintenance du système de thalassothermie de l’ENSM. (© Aletheia Press / L.Brémont)
Frédéric Blond en charge de la maintenance du système de thalassothermie de l’ENSM. (© Aletheia Press / L.Brémont)

Sur le quai Frissard, au Havre, le bâtiment aux allures de navire, qui abrite l’Ecole nationale supérieure maritime (ENSM), est un point de repère dans le paysage urbain. Construits en 2015, les locaux donnent le sentiment aux futurs officiers d’être en mer. Une ambiance océanique déclinée jusque dans le mode de chauffage choisi : la thalassothermie. Cette particularité a été l’objet d’une visite guidée, le 3 avril dernier, dans le cadre du grand défi écologique 2024, organisé par l’Ademe.

S’adapter à l’environnement et aux besoins

Sur le principe de la pompe à chaleur, c’est l’eau de mer qui permet de chauffer le bâtiment en hiver et de le refroidir en été. « Lors de la conception, ce système était, et reste encore près de dix ans plus tard, innovant » souligne Soazig Louazel, ingénieure conseil au sein de AIA ingénierie, en charge de l’ingénierie BET fluides et VRD. Si le principe apparaît simple, sa mise en œuvre est délicate. Pour preuve, l’échec du système de pompe à chaleur réversible alimentée par l’eau du bassin Paul Vatine du Carré des Docks au Havre, inauguré en 2016.

L’approche de AIA ingénierie a donc été évolutive « pour nous adapter à l’environnement et aux besoins de l’école, relève Soazig Louazel. Au début, des pompes immergées sont envisagées « mais les rendements moins élevés et les disfonctionnements liés à la corrosion nous ont fait renoncer. » C’est donc un système passif de capteurs immergés (ayant le rôle d’échangeur) qui est préféré, diminuant la maintenance. « Même si de la vase les recouvrent, les échanges thermiques se poursuivent » note, au passage, l’ingénieure. « Un seul nettoyage a été effectué depuis 2015 » remarque Frédéric Blond en charge de la maintenance du système.

Un système efficace

Il s’agit ensuite de déterminer sur quel support installer ces capteurs. « Fixés directement au quai du Cameroun sur 100 m, ils gênaient l’appontement des bateaux et la maintenance du quai » remarque Soazig Louazel. Une autre solution est donc envisagée : la fixation sous un ponton déplaçable. Des essais révèlent des problèmes d’usure au niveau des raccordements. Finalement, AIA ingénierie valide un système de berceau fabriqué avec les matériaux des coques de navire. Celui-ci sera immergé dans le pertuis de la Chapelle, derrière l’école et hors de la circulation des navires. La puissance des échangeurs, de forme cylindrique et fabriqués en PEHD, est fixée à 300 kW.

L’installation remplit ses objectifs et montre une certaine résilience. « Actuellement, un capteur sur les deux fonctionne, mais c’est suffisant. Seuls les amphithéâtres sont parfois un peu plus délicats à gérer » note Frédéric Blond. Une sous occupation des salles permet également de ne pas pâtir de la situation temporaire. « Le bâtiment a été prévu avec un effectif de 1000 personnes et nous sommes actuellement 600 » rebondit Guillaume de Beauregard, directeur du site havrais de l’ENSM.

Outre la géothermie marine, l’école a été conçue avec l’objectif d’une autonomie énergétique : panneaux photovoltaïques, utilisation d’une double peau en résille isolante sur la façade… l’ENSM s’est voulue précurseur. Une démarche innovante qu’elle poursuit à de nombreux niveaux. « Face au retour de la propulsion à la voile, nous en sommes en pleine réflexion pour intégrer ses aspects dans les formations » constate Guillaume de Beauregard.

Pour Aletheia Press, Laetitia Brémont