L’entreprise et les salariés
Revue de récentes décisions en matière de droit du travail.
Temps de travail : pauses
La cour d’appel a constaté que pendant ses temps de pause la salariée était libre de rester dans le local prévu à cet effet, ou d’aller où bon lui semblait, et que pesait sur elle la seule obligation de présenter un comportement irréprochable et de rester en tenue de travail pour évoluer au sein de l’aéroport. Elle a pu en déduire que la salariée ne se trouvait pas, pendant son temps de pause, à la disposition de l’employeur, et la débouter de sa demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires liées au temps de travail réalisé pendant ses pauses journalières et des congés payés afférents. (Cass soc., 3 juin 2020, pourvoi n° 18-18836)
Santé au travail : licenciement
Ne constitue pas l’énoncé d’un motif précis de licenciement l’inaptitude physique du salarié, sans mention de l’impossibilité de reclassement. Est dépourvu de cause réelle et sérieuse, le licenciement motivé par l’inaptitude du salarié et le refus par celui-ci d’une proposition de poste. (Cass soc., 3 juin 2020, pourvoi n° 18-25757)
Santé au travail : reclassement
Aux termes des dispositions de l’article L.1226-2 du Code du travail, à l’issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou à un accident, si le salarié est déclaré par le médecin du travail inapte à reprendre l’emploi qu’il occupait précédemment, l’employeur est tenu de lui proposer un autre emploi approprié à ses capacités. Ce, compte tenu des conclusions écrites du médecin du travail et des indications qu’il formule sur l’aptitude du salarié à exercer l’une des tâches existantes au sein de l’entreprise et aussi comparable que possible à l’emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations ou transformations de poste de travail.
C’est à l’employeur d’apporter la preuve de l’impossibilité dans laquelle il se trouve de reclasser le salarié. La sanction de la violation de l’obligation de reclassement ne peut donner lieu qu’au versement d’une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. (Nancy, 11 juin 2020 , RG n° 19/01011)
Licenciement : insuffisance professionnelle
La cause réelle est celle qui présente un caractère d’objectivité. Elle doit être existante et exacte, ce qui oblige le juge à vérifier que d’autres faits allégués par le salarié ne sont pas la véritable cause du licenciement. La cause sérieuse est celle d’une gravité suffisante pour rendre impossible la poursuite des relations contractuelles. L’insuffisance professionnelle est l’incapacité objective, non fautive et durable, pour un salarié à occuper son poste et à remplir ses fonctions de manière satisfaisante. Elle doit reposer sur des éléments précis et objectifs, vérifiables et imputables au salarié. (Orléans, 11 juin 2020, RG n° 17/02254)
L’insuffisance professionnelle constitue une cause légitime de licenciement, à condition que l’incompétence alléguée repose sur des éléments concrets et suffisamment pertinents pour justifier la rupture du contrat de travail, en ce qu’elle perturbe la bonne marche de l’entreprise ou le fonctionnement du service. Ce, sans qu’il soit pour autant nécessaire d’établir l’existence d’un préjudice chiffrable pour l’entreprise. (Rouen, Chambre sociale, 25 juin 2020, RG n° 17/05040)
Licenciement : motif économique
Pour avoir une cause économique, le licenciement pour ce motif doit être consécutif soit à des difficultés économiques, soit à des mutations technologiques, soit à une réorganisation de l’entreprise, soit à une cessation d’activité. La réorganisation, si elle n’est pas justifiée par des difficultés économiques ou par des mutations technologiques, doit être indispensable à la compétitivité de l’entreprise. (Nancy, 11 juin 2020, RG n° 17/00988)
Contrat de travail : salariat
Il y a contrat de travail lorsqu’il y a fourniture d’un travail, paiement d’un salaire et état de subordination. Le travail bénévole exclut la qualification de contrat de travail. L’état de subordination, qui est une notion juridique, et non pas économique, implique l’existence d’un pouvoir de direction, de contrôle et de sanction des manquements. Il appartient à celui qui se prévaut d’un contrat de travail d’en rapporter la preuve. A l’inverse, en présence d’un contrat de travail apparent, il incombe à celui qui invoque son caractère fictif d’en apporter la preuve. (Lyon, Chambre sociale C, 25 juin 2020, RG n° 18/06144).
François TAQUET, avocat,
spécialiste en droit du travail et protection sociale