Les régions les plus favorables à l’installation en bio

Où implanter son exploitation agricole en bio? Toutes les Régions ne sont pas également accueillantes, d’après le palmarès de la FNAB, Fédération nationale d’agriculture biologique. Un enjeu de taille dans le contexte du très nécessaire renouvellement des générations.

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Pour installer son exploitation en agriculture biologique, mieux vaudra choisir la Nouvelle-Aquitaine plutôt que la Normandie… Le 12 décembre dernier, lors d’une conférence de presse en ligne sur « Dans quelles régions fera-t-il bon s’installer en bio en 2023 ? », la FNAB, Fédération nationale d’agriculture biologique, a dévoilé son palmarès. Deux régions arrivent en tête des collectivités les plus favorables à ce type de projet : la Nouvelle-Aquitaine et le Centre-Val de Loire. Elles sont suivies de trois autres, Pays de la Loire, Île-de-France et Occitanie . Se placent ensuite, la Bourgogne-Franche-Comté et la Provence-Alpes-Côte d’Azur. En revanche, le Grand Est, la Normandie et la Bretagne obtiennent des notes négatives. Quant aux Hauts-de-France, à la Corse, et aux DOM-TOM, elles ne sont pas classées par manque de données. Dans ce dernier groupe, les DOM-TOM sont dotés de règles spécifiques, et les orientations des deux autres régions ne sont pas encore connues. A ces réserves près, ce classement est « révélateur de la politique agricole des régions dans leur soutien à l’agriculture biologique », estime Alan Testard, secrétaire national chargé de l’installation/ transmission à la FNAB.

A l’origine du palmarès, un changement de gestion de la politique publique : dans le cadre de la nouvelle Politique agricole commune (PAC), le ministère de l’Agriculture français a confié la gestion des aides à l’installation des jeunes agriculteurs aux Régions à partir du 1er janvier 2023. Jusqu’alors, ces aides étaient gérées par l’État, via des comités d’orientation départementaux. Au cœur du dispositif, la DJA, Dotation jeune agriculteur : elle s’adresse aux jeunes de moins de 40 ans qui s’installent, détenteurs de la capacité professionnelle agricole et ayant mené une étude économique sur leur projet. Il s’agit d’une aide à la trésorerie d’un montant de base de 14 000 euros environ, auxquels s’ajoutent des bonus supplémentaires nommés « modulations », en fonction de différents critères : la valeur ajoutée du projet en matière d’emploi, le bio…. Auparavant, les Régions pouvaient compléter la DJA par des aides locales de diverses natures. Désormais, elles sont décisionnaires quant à l’importance qu’elles souhaitent donner aux diverses « modulations », qui s’ajoutent à la DJA.

L’installation en bio, un double enjeu

L’enjeu est de taille, dans un contexte tendu, où du renouvellement de la population agricole dépend la survie même de l’activité. En effet, rappelle la FNAB, 200 000 fermes sont à transmettre dans les cinq ans, en raison du vieillissement de cette population. Or, d’après les chiffres du ministère de l’Agriculture, entre 2010 et 2020, l'Hexagone a perdu 100 000 exploitations agricoles pour n’en compter plus que 389 000. En 1970, elles étaient 1 600 000 ! Et dans les années à venir, 130 000 autres risquent de disparaître, le nombre d’installations (14 000 par an, environ) ne compensant pas les pertes. Pour limiter, voire, retourner la tendance, « ce ne sont pas les fils et filles d’agriculteurs qui vont assurer ce renouvellement », pointe Alan Testard . De plus en plus, en effet, des personnes non issues du milieu agricole se lancent dans ce type de projet. C’est déjà le cas pour environ le tiers des nouvelles installations, d’après la FNAB. « Une grande majorité d’entre eux ne veulent faire que du bio », complète Alan Testard.

Pour la FNAB, favoriser leur installation répond donc à un double enjeu : assurer le renouvellement des générations des agriculteurs et favoriser un modèle agricole vertueux. Par exemple, en juin dernier, dans son rapport « Le soutien à l’agriculture biologique », la Cour des Comptes a reconnu l’impact positif du bio en matière de santé, pour les producteurs et les consommateurs, du fait de la non-utilisation de pesticides chimiques de synthèse. Et également sur l’environnement, concernant la préservation des ressources en eau. L’Office français sur la biodiversité, lui, a souligné l’impact positif de ce type d’agriculture sur la biodiversité.

Des déséquilibres potentiels et des inconnues

Au niveau national, pour le bio, « le gouvernement a des ambitions, dont celle d’atteindre 18 % de la surface agricole utile en 2027. Nous ne sommes pas sûrs d’atteindre ce niveau, si nous n’avons pas plus d’installations en bio », alerte Philippe Camburet, président de la FNAB. Mais la Fédération redoute à présent également des difficultés au niveau local. « Notre palmarès présente des disparités entre les régions relativement importantes, qui nous inquiètent », pointe Alan Testard. Des porteurs de projets pourraient, en effet, hésiter à s’implanter dans une région qui ne favorise par leur installation en bio. « Cela va sans doute rebattre le contexte de l’installation dans les prochaines années », estime Philippe Camburet. Il reste pour l’instant difficile d’évaluer précisément l’impact de ces disparités. En particulier, la FNAB juge qu’il est « un peu tôt » pour mesurer le risque que pourrait faire peser sur certaines filières une politique régionale peu favorable à l’installation en bio. En revanche, « nous savons que les installations en bio sont de bon augure pour la diversification des cultures. Dans les régions qui sont hyperspécialisées, le bio peut apporter cette diversité. On peut donc être inquiet, si l’installation de ce type d’agriculture n’est pas encouragée », explique Philippe Camburet.

Toutefois, si le sujet est crucial, l’accueil des nouveaux arrivants ne résume pas les politiques régionales concernant le bio, nuance la FNAB. Et une autre inconnue s’ajoute au tableau : une nouvelle loi d'orientation et d’avenir agricoles devrait être présentée au Parlement, au premier semestre 2023. La concertation a été lancée en décembre par Marc Fesneau, ministre de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire. Le texte vise précisément à faire face au renouvellement des générations. Il entend donc couvrir l'orientation et la formation, la transmission, l'installation des jeunes agriculteurs, ainsi que la transition et l'adaptation face au climat...