Entreprises et cotisations sociales : du côté des tribunaux

Revue de récentes décisions en matière de contrôles et redressements Urssaf.

Entreprises et cotisations sociales : du côté des tribunaux

Opérations de contrôle

Dans ce litige, l’adresse électronique indiquée dans l'avis de contrôle ne permettait pas de consulter aisément la charte du cotisant contrôlé, avant le début des opérations de contrôle. Si l'avis précisait l'adresse du site de l'Urssaf, il était nécessaire d'effectuer quatre opérations successives, aucune ne mentionnant la possibilité d'avoir accès à la charte et de la télécharger. L'Urssaf, débitrice de l'obligation de porter à la connaissance du cotisant contrôlé le contenu de la charte, ne saurait lui reprocher de ne pas avoir sollicité la communication de celle-ci, ni se prévaloir utilement de ce que la charte est accessible sur le site service public.fr. Dès lors, c’est à juste titre, que le tribunal a dit que l'avis de contrôle était nul et de nul effet, emportant annulation des opérations de contrôle, de redressement et de recouvrement subséquentes. (Rouen, Chambre sociale, 14 décembre 2022., RG n° 20/02180)

L'article R. 243-59 du Code de la sécurité sociale n'autorise pas l'agent chargé du contrôle de solliciter d'un tiers à l'employeur, notamment d'un expert-comptable, des documents qui n'ont pas été demandés à ce dernier. (Paris. Pôle 6/ Chambre 13, 2 décembre 2022, pourvoi n° 19/07507)

Le principe de l'égalité des citoyens n'implique pas que les procédures de contrôle doivent être exactement similaires selon les différents régimes de protection sociale. (Rennes, 9ème Ch Sécurité Sociale, 14 décembre 2022, RG n° 18/07071)

L’infraction de travail dissimulé ne nécessite pas d'intention frauduleuse et une déclaration préalable à l'embauche tardive ou postérieure, même sans volonté de fraude, suffit à la caractériser. (Toulouse, 4ème Chambre Section 3, 16 décembre 2022, RG n° 20/03742)

Mise en demeure

La seule mention sur la mise en demeure de « cotisations du régime général » avec une astérisque indiquant qu'y sont incluses les contributions d'assurance chômage et les cotisations AGS, est insuffisante pour permettre à la cotisante d'avoir connaissance à la fois de la nature des cotisations dont le paiement lui est demandé, mais surtout des montants par période, pour chacune de ces cotisations. La circonstance que la cotisante a procédé à ses déclarations de salaires sur lesquels sont assises certaines cotisations du régime général est inopérante. La motivation de cette mise en demeure qui ne détaille pas, par nature de cotisations, les montants demandés est entachée d’irrégularité affectant sa validité. (Aix-en-Provence. Chambre 4-8. 9 décembre 2022. RG n° 21/08307)

Il résulte des dispositions de l'article L. 244-2 du Code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable à la mise en demeure litigieuse, que toute action ou poursuite effectuée en application de l'article L. 244-1 ou des articles L. 244-6 et L. 244-11 du même code est obligatoirement précédée, d'une mise en demeure adressée à l'employeur l'invitant à régulariser sa situation dans le mois. En l'espèce, la mise en demeure ne mentionnait expressément aucun délai imparti au cotisant pour procéder au paiement. Celle-ci, irrégulière de ce fait, doit être annulée. Cette nullité prive en conséquence de fondement l'obligation au paiement des sommes qui en font l'objet. (Paris., Pôle 6 chambre 13, 9 décembre 2022. pourvoi n° 19/10114)

Contrainte

Comme la mise en demeure, la contrainte doit préciser à peine de nullité, la nature des cotisations, l'étendue et la cause de l'obligation du débiteur et la période à laquelle elle se rapporte, sans que soit exigée la preuve d'un préjudice. L'inobservation de ces prescriptions n'est pas un simple vice de forme et affecte la validité de la contrainte. Le fait que les sommes globales réclamées dans la contrainte correspondent aux mises en demeure délivrées préalablement n'est pas suffisant dans la mesure où, en l’espèce, la référence de la mise en demeure mentionnée sur la contrainte est erronée, tant dans son numéro que dans sa date. Ainsi, la cotisante n'était pas en mesure de connaître la nature des cotisations, l'étendue et la cause de son obligation. En conséquence, la contrainte sera annulée. (Toulouse, 4ème Chambre, Section 3, 16 décembre 2022, RG n° 20/02903)

François TAQUET, avocat,
spécialiste en droit du travail et protection sociale